Samson Reymondin

Révolutionnaire pulliéran, 1769-1830

Lecture à voix haute

« Boutons les Bernois hors du Pays de Vaud ! Comme nos voisins Français, faisons la Révolution ! Mes amis patriotes et moi-même sommes prêts à mettre toutes nos forces dans la lutte contre la tyrannie et le vice. S’il le faut, j’irai au cachot, mais pas question de subir plus longtemps ce joug perfide, c’en est assez ! Et un jour, peut-être, je pourrai vivre paisiblement parmi les miens, à Pully… »

De son nom complet Jean-Samson-Louis Reymondin, Samson Reymondin est né le 11 novembre 1769 à Pully. Fils de Marie-Catherine Borgeaud et d’un agriculteur également juge, septième enfant d’une fratrie de douze, il se démarque par son intelligence. Il profite donc d’une éducation plus poussée, qui lui permettra d’être commis libraire chez Barde et Manget à Genève.

Portrait Reymondin
Figure 7.1 : Benjamin-Samuel Bolomey, Reymondin, 1803, dessin sur papier, 11 x 10 cm, Musée historique de Lausanne.

C’est dans cette ville qu’il est arrêté par le lieutenant Naville le 14 septembre 1791, accusé d’avoir participé durant l’été précédent à des banquets commémorant la Révolution, d’avoir rédigé des lettres et pamphlets contre le pouvoir bernois, d’avoir lancé des appels à la révolte et d’avoir répandu des ouvrages de propagande dans le pays de Vaud. Reymondin s’était en effet lié aux Patriotes Helvétiens, des révolutionnaires souhaitant que le Pays de Vaud s’inspire des changements politiques récents en France. Le pouvoir bernois, mis au courant de ses agissements, exige alors que Reymondin soit arrêté et extradé de Genève.

Samson Reymondin – Adresse aux habitants du pays de Vaud par l’un de leurs concitoyens [enregistrement ArchéoLab] :

Pamphlet révolutionnaire
Figure 7.2 : Textes révolutionnaires vaudois.
Figure 7.3 : Caricature représentant la Révolution vaudoise personnifiée par la femme au centre qui repousse l’ours bernois hors du Pays de Vaud.

Avant même sa condamnation, Reymondin réalise une première tentative d’évasion le 23 décembre 1791, mais il sera repris rapidement. Quelques mois plus tard, le 11 mai 1792, il est condamné à 25 ans de prison pour cause d’adresse révolutionnaire aux habitants du Pays de Vaud, d’appel à la révolte, de lettres honteuses à ses parents et aux avoyers de Berne et, enfin, de relations condamnables à Genève. On l’interne alors à l’Hôpital de l’Isle, où ses conditions d’emprisonnement sont décrites comme très rudes. Le 6 mai 1793, Reymondin s’évade pour de bon, après avoir scié les grilles de sa fenêtre à l’aide de petites lames de métal et quitté sa cellule grâce à une corde. Il se réfugie ensuite à Ferney, à Genève puis à Lyon, où un agent français lui permet de se mettre à l’abri.

On perd ensuite sa trace, jusque vers 1800, quand il est portraituré en chef de brigade helvétique par Benjamin Bolomey, puis devient député au Grand Conseil dès 1803. Le 3 octobre de la même année, alors qu’il semble à nouveau vivre en paix à Pully, Samson se marie avec Elisabeth-Sophie, fille de Victor Eternod. Dès lors, ils vivent dans la propriété de la famille Eternod, la campagne dite la Perraudette proche de Pully. En 1809, ou même avant, il est greffier de la Justice de Paix à Pully et, en 1816, juge au tribunal de district de Lausanne. Reymondin décède le 4 mars 1830, sans descendance. Plus de 80 personnes assisteront à son enterrement. Le 3 février 1851, âgée de 68 ans, sa femme décède à son tour. Dans son testament, Reymondin avait demandé que 100 francs soient pris annuellement sur le revenu de ses biens pour financer une caisse de famille, destinée à aider les pères de famille dans le besoin, pour autant qu’ils n’aient pas laissé mendier leurs enfants mais les fassent « subsister par une vie laborieuse et sobre en les faisant instruire ».

Samson Reymondin a inspiré plusieurs écrits, la plupart rendant hommage à ce personnage pulliéran. Jean Desonnaz, membre du tribunal révolutionnaire de Genève en 1794, a écrit l’Histoire du patriote Reymondin pendant sa détention dans les différentes bastilles du canton de Berne, un titre qui indique l’aspect rocambolesque de ses aventures. Reymondin apparaît également dans une pièce d’Henri Warnery, Le peuple vaudois, 1903. On connait encore une sorte de comptine, alors appelée « romance », narrant les « malheurs de Reymondin », qui condamne notamment les agissements du lieutenant Naville. Celui‑ci, condamné à mort par contumace en 1794, a témoigné de sa propre bonne conduite auprès de Reymondin, ce que confirme dans une lettre un cousin de Samson, Nicolas-Didier Hébert, émailleur à Genève.

À Pully, une avenue porte le nom de Reymondin suite à une pétition datée du 18 décembre 1928 qui demandait à la Municipalité de lui rendre hommage.