C. F. Ramuz

Écrivain, 1878-1947

Lecture à voix haute

« Je n’habite Pully que depuis deux ou trois mois ; je parle donc en simple « spectateur ». Je vous dis ce qui m’y a frappé et que c’est, tout près de Lausanne, un caractère de permanence ou de survivance […]. Il est vrai que j’y ai trouvé une vieille maison tranquille (à part quelques terribles petits canots-moteurs) et que la tranquillité est un grand bien. Mais cette maison est entourée de plusieurs maisons pareilles qui font même tout un quartier, et c’est par là qu’elles prennent leur sens. »

Journal de Pully du 26 septembre 1930

Tout juste décoré du prix Romand, C. F. Ramuz (Charles Ferdinand) arrive à Pully le 20 mai 1930 et suscite la fascination des habitants. L’auteur s’installe au Chemin Davel, dans La Muette. C’est durant l’époque bernoise que cette maison aurait été construite. Elle était alors habitée par la famille Borgeaud, dont plusieurs membres ont occupé des charges officielles à Pully dès le XVIe siècle, notamment Gédéon Borgeaud, qui était banneret (chevalier ayant le droit de porter la bannière) de Pully. À la fin de sa vie, son nom a même été coulé dans le bronze de l’une des deux cloches de l’église. En 1790, il lègue sa maison à son fils aîné, Jean-François, tandis qu’il fait construire une maison voisine à son fils cadet, Jean-Samuel. Cette dernière abrite aujourd’hui le Musée d’art de Pully. D’autres héritiers de la famille Borgeaud occuperont ce lieu jusqu’à l’achat effectué par C. F. Ramuz en 1930. La Muette est un exemple typique des maisons vigneronnes, comme l’indiquait la présence d’un pressoir et d’une cave voûtée pour stocker le vin. La façade de la maison peinte en rose a inspiré des interprétations poétiques : la couleur aurait été obtenue grâce à un mélange de sable et de vin provenant des récoltes de la région.

C. F. Ramuz – Pully 1940 :

Ramuz La Muette
Figure 9.1 : La Muette, maison de C. F. Ramuz de 1930 à 1947.

Fils et petit-fils de paysans et de commerçants, C. F. Ramuz est né le 24 septembre 1878 à Lausanne. Il s’oriente rapidement vers des études de Lettres à l’université de Lausanne, qu’il poursuit à Paris vers 1900. Le 5 décembre 1903, C. F. Ramuz publie son premier article, Sur Weimar, dans la Gazette de Lausanne. En 1904, il décide de s’installer dans la capitale française pour se dévouer uniquement à l’écriture. Durant ses dix années parisiennes, il écrit de nombreux ouvrages tels que Aline (1905), Circonstances de la vie (1906), Jean-Luc persécuté (1909), Aimé Pache, peintre vaudois (1911) et Vie de Samuel Belet (1913). C’est également durant cette période qu’il rencontre l’artiste neuchâteloise Cécile Cellier, qu’il épouse en 1913. Ensemble, ils donnent naissance à leur fille unique, Marianne.

De retour en Suisse, il fonde, en collaboration avec Paul Budry, Edmond Gilliard et Ernest Ansermet, Les Cahiers vaudois, dans lesquels il publie ses œuvres de 1914 à 1918.

L’écrivain vaudois ne manque pas d’ambition : « … je crois avoir conscience de ma valeur et je souffre de ce qu’autrui ne la remarque pas, cet autrui qu’on dédaigne si souvent et qui nous est si nécessaire. J’aurais besoin d’encouragements… ». Ses paroles ont été entendues, puisqu’en 1930, il remporte le prix Romand. C. F. Ramuz investit la somme reçue, 30’000 francs, dans l’achat de La Muette, où il vit jusqu’à sa mort le 23 mai 1947. L’écrivain a également conquis les juges du Grand Prix de la Fondation Schiller en 1936, obtenant ainsi la plus haute distinction littéraire suisse. Au total, C. F. Ramuz aura écrit plus d’une vingtaine de romans, de nombreux récits, poèmes, essais et articles.

Ramuz portrait Muette
Figure 9.2 : Portrait de C. F. Ramuz devant La Muette.

C’est avec regret que les Pulliérans ont dit adieu à ce grand homme. Il laisse derrière lui le souvenir d’une haute silhouette à chapeau traversant les ruelles de Pully et d’un talent honoré et célébré. Sa maison rose, La Muette, conserve la mémoire de C. F. Ramuz, elle témoigne de son caractère et incarne son patrimoine qui ne pourra être oublié.

La Muette ouvrira ses portes au public à l’automne 2023 et chacun pourra y découvrir le lieu de création des dernières années de l’auteur vaudois.

Article Ramuz Vieux Pays 1930
Figure 9.3 : Article sur Pully écrit par C. F. Ramuz dans le Journal de Pully du 26 septembre 1930.